Elections européennes du plus flippant... Vive l'info !
Brangues, petit village nord-isérois niché à la frontière de l’avant
pays-savoyard, 616 habitants, 7 juin 2024
37 panneaux électoraux.
34 vides, de mémoire.
3 affiches dessus.
Extrême-droite et extrêmement extrême-droite.
Dans un village où l’immigration est plutôt de l’ordre du raz-de-marée
touristique par la présence du château de Paul Claudel que s’apparentant au 13ème
arrondissement de Paris en plein nouvel an chinois.
Au-delà du ridicule du nombre de panneaux vides, c’est la présence unique
de ces pourvoyeurs de peur sur ces mêmes panneaux qui me fait hurler
intérieurement.
Le même jour, je consulte Twitter, un de mes moyens d’informations
depuis que ma télé a été donnée à mon maréchal ferrant en échange de 4 beaux
fers à mon cheval, il y a 6 ans.
Les sondages que je vois passer ici et là, les débats présentés depuis quelques
jours ne montrent que les mêmes listes médiatiques, toujours les mêmes têtes
(parfois en mansplanning, coucou Gaby-qui-pense-qu’une-femme-a-besoin-qu’on-pense-à-sa-place),
toujours les mêmes discours.
Je constate aussi que malgré les faits objectifs qui démontrent l’inefficacité
et l’absence physique au parlement européen de Jordanounet entre autres, il
reste apparemment en tête de gondole de ce supermarché discount de valeurs
humaines (ses « Valeurs » à lui sont « Actuelles », tu
m’as comprise)
Je ne vois pas apparaître les petites listes, celles qui tentent d’émerger,
avec de belles idées.
Crémieu, cité médiévale du Nord-Isère un peu plus pourvue en habitants
issus d’une immigration quelle qu’elle soit, et un peu plus d’affiches sur les
panneaux, 8 juin 2024
J’ouvre les enveloppes électorales.
20 papiers, pour 37 listes.
Je regroupes les programmes car certains en ont 2, voire 3 (coucou le bellâtre italien
anti-immigration)
13 propositions papier.
Pour 37 listes je le rappelle, et donc autant de propositions morales au
départ.
À quel moment on a autant foiré dans notre démocratie ?
Du coup, je me lance dans une analyse complètement personnelle de la
situation…
« Celui qui contrôle les médias contrôle les esprits » Jim Morrison.
Il avait tout compris le mec. Il s’est même barré pour qu’on ne vienne plus le
contrôler. Il est sur son île avec Mickaël, Amy et Bob on a dit.
Un constat
complètement personnel : je m’entoure inconsciemment de plus en plus de
personnes qui n’ont plus la télévision. Ces personnes s’informent, mais
différemment. Elles vont chercher les informations dont elles ont besoin. Elles
ne sont pas gavées d’informations qui ne les concernent pas. Pour être franche,
ce sont majoritairement des personnes de moins de 50 ans.
Moi de mon temps, dans
ma jeunesse, naguère, autrefois, nous avions 6 chaînes à la télé. Et même pas
canal + d’abord.
Chaînes publiques et chaînes privées. Choix du canal d’informations.
Chez moi, on prenait les infos sur le 6 minutes (d’ailleurs, ça a déjà vraiment
duré 6 minutes ?!). Et basta.
Aujourd’hui, je
constate que la télé est un membre à part entière de la famille chez beaucoup de
personnes. On ne se rend même pas compte qu’elle est allumée.
Je le voyais fréquemment lors de ma carrière d’orthophoniste, majoritairement
lors de rééducation de retard de langage, qui souvent régressaient quand je
proposais aux parents d’éteindre la télé (‘tention, on généralise pas, parfois
il y a un trouble qui n’est pas lié aux écrans).
Et aujourd’hui, à la
télé on a quoi ? Un milliard de chaînes, et des sources d’infos en continu,
toujours à la recherche du titre qui va t’en faire oublier ton bourguignon sur
la gazinière.
Et comme ça toute la journée.
Des chaînes d’informations privées notamment. Qui dit privées, dit avec
orientation éditoriale.
Et quelle orientation…
Toute la journée, on apprend qu’il y a eu un crime par-ci, un viol par-là, et
si le criminel a la bonne idée d’être de couleur, il aura même droit d’être
scanné et décrypté par tous les non-experts du monde, en boucle. Mais ces
crimes et viols, ils ont lieu loin, ailleurs. Bien loin de Crémieu ou de
Brangues.
Mais insidieusement,
silencieusement, va se distiller dans la tête des téléspectateurs l’idée que le
monde est plein de criminels qui veulent violer nos enfants et nous voler notre
Dacia. Et qu’en plus, ce sont souvent des étrangers qui nous volent notre
travail, vous vous rendez-compte ?
Le procédé est
simplissime. Si je te dis « ne pense pas à une girafe », tu as quoi
dans la tête ? Certainement pas un éléphant mais bien une girafe, quelle
que soit la négation. Et bien c’est pareil, si tu entends toute la journée « arabe »
« crime » « drogue » « étrangers » « immigration »
« Bardella », quelles que soient les tournures de phrases, même si je
doute que Jordaninou ait déjà pu dire que l’origine des personnes issues de l’immigration
ne soient liées en rien au taux de criminalité, tu associeras ces termes dans
ton esprit. ,
Sauf qu’en vrai, perso, c’est pas un migrant qui est venu m’agresser
sexuellement mais un membre de mon entourage bien de chez nous, comme chez
beaucoup de femmes (profites-en pour demander autour de toi, tiens). Forcément,
chez moi, ce discours anti-autres ne prend pas. Parce que je n’ai pas cet
afflux d’informations dramatiques en perfusion.
Pourtant, il prend chez beaucoup.
Il fait le nid des idées les plus terribles à l’encontre d’autres êtres
humains.
C’est ainsi par
exemple que Bernard a commencé à se méfier d’Ahmed, son voisin depuis 30 ans,
simplement parce qu’il s’est mis à avoir peur. De quoi, il ne sait pas
exactement. Ben ouais, c’est une peur qui appartient à d’autres, ceux qui sont derrière
l’écran, pas à lui. Mais il croit ce qu’on dit dans la télé, comme avant, comme
quand il ne regardait que le journal de 13H puis celui de 20H sur France 2.
Donc demain, Bernard va voter pour celui qui a mis 3 papiers dans l’enveloppe
électorale. Il ne va pas aller chercher les autres informations, il pense les
avoir toutes, puisqu’avant on avait tout dans l’enveloppe.
Il pense qu’il n’a que ce choix-là.
Parce que Bernard fait confiance à ce qu’on lui dit dans le poste. Il ne voit
pas qu’on vient orienter sa pensée à force de sondages et de gros titres racoleurs.
Il ne voit pas que ces informations divisent au lieu de réunir. Il ne voit pas
qu’il n’est qu’un instrument de haine.
Pourtant, un jour, Bernard tombera peut-être en panne de voiture. Peut-être que
ce sera Ahmed qui le dépannera. Bernard reparlera peut-être à Ahmed. Et Bernard
se dira qu’il a peut-être merdé. Et Bernard éteindra peut-être sa télé. Ou
offrira 4 jolis pneus à sa Dacia en échange, qui sait…
En tout cas, moi,
demain, j’irai dans l’isoloir avec un bulletin de vote que j’aurai imprimé
moi-même. Parce que justement, je n’ai pas vu les propositions de cette liste
dans les merdias.
Un aveu de sincérité à mes yeux.
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